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"La tournée Américaine"

 

27 Juillet 1984

 

N° 1835

 
 

 

L'explosion Jackson.

Michael Jackson : sa tournée américaine bat tous les records de recette et de folie de l'histoire du Rock.

 

Sa tournée américaine bat tous les records de recette et de folie de l'hisoire du rock..

 




C'est la tournée la plus extraordinaire de la saison et peut-être la plus importante de tous les temps. Pendant douze semaines, l'ange Michael Jackson donnera une quarantaine de récitals dans les plus grandes villes des Etats-Unis. On attend 1,2 millions de spectateurs. "La tournée nitroglycérine" ironisent les professionnels qui pensent que le fait de se produire dans des stades est une incitation au désordre et à l'émeute. "Nous ne sommes pas de casseurs" réplique Joe Jackson père et promoteur de la tribu. Le concert inaugura du "Jackson's Victory Tour", le 6 juillet dernier à Kansas City, attira 45 000 personnes sans l'ombre d'un incident. Le vendredi 13 juillet au Texas Stadium de Dallas, il fait 40° sous la pleine lune. 40 000 fans hurlent le nom de leur idole qui chante et danse sous les fumigènes. Jean-Michel Caradec'h raconte sa nuit avec l'Etoile.



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Il a fait transformer son boeing 707 en palace.

La tournée du Jackson Circus ressemble à une longue et glorieuse chevauchée de western. Le petit Prince du show business entraîne avec lui, outre ses frères et ses chansons, des tonnes de sono et de lasers, des chariots élévateurs et leurs mécaniciens, des pyrotechniques et leurs feux d'artifice, 17 éclairagistes, 10 habilleuses et 8 assistants pour surveiller le chapiteau. Tout ce monde et ce matériel se déplacent en semi-remorques. En tout, près de 500 personnes. Mais Michael Jackson, lui, préfère son Boeing 707 privé de sa voiture blindée. Lorsqu'il traverse à pied et à toute vitesse le hall des hôtels ou les aéroports, un garde du corps monumental le précède. D'autres hommes l'encerclent et d'autres encore ferment la marche. Don King, le roi des managers de boxe, a avancé au clan Jackson trois millions de dollars cash pour organiser la tournée, garantissant aux six frères près de trois millions et demi de dollars chacun. Le "Jackson's Victory Tour" rapportera 40 milliards de centimes en 12 semaines. Au départ, les billets n'étaient vendus que par quatre. Intègre et vertueux, Michael a mi-bon ordre dans ce "règlement" afin qu'une personne seule puisse avoir le droit de l'applaudir. Mais le prix du billet n'a pas été baissé pour autant. Trente dollars, c'est beaucoup pour ses fans des ghettos noirs. "Michael doit penser que nous sommes aussi riche que lui", dit l'un des deux.*

* Ce n'est pas Michael ou ses frères qui ont fait le calcule des prix des places ( Ndw)


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Dans le désert d'une planète froide, sous la lumière verte et rose tombée du ciel, quatre étranges créatures semblables à des dromadaires aux longs poils laineux s'avancent d'une démarche incertaine. Leurs pas résonnent sur le sol comme des roulements de tonnerre dont l'écho se prolonge. Soudain, un rayon bleu. Né du fond de l'espace, il allume des reflets sur la lame d'une gigantesque épée enchâssée dans un rocher noir. Perpétrant un antique rite, des êtres à l'apparence humaine tentent en vain de l'en retirer. Ils s'arc-boutent et de sous leurs casques sidéraux à l'aspect maléfique, retentissent des cris affreux. Alors que les cieux s'enflamment et tonnent, courroucés par ce sacrilège, apparaît le chevalier des étoiles. Dans sa combinaison d'acier fondu, il vole plus qu'il ne marche vers l'autel barbare au rythme des orgues galactiques. Sa longue cape de soie flotte derrière lui comme la trace du météore. Il escalade le rocher et d'un coup, d'un seul, arrache l'épée magique qui s'enflamme lorsque le héros la brandit au-dessus de sa tête. Ce geste suffit à déchaîner l'enfer. La terre d'où surgissent des monstres métalliques aux gueules de feu, gronde et tremble ; des lasers verts, rouges entrechoquent leurs rayons mortels. Le chevalier assailli de toutes parts virevolte et de taille d'estoc de son épée flamboyante tranche des tentacules immondes, perce des yeux de braise, arrache des plaques d'acier, fait jaillir des fleuves d'étincelles ensorcelées par une musique diabolique. Il tombe, il est près de succomber. Mais, dans un ultime effort il se relève et met en fuite ses ennemis. Victoire. A peine essoufflés il escalade le rocher émergeant d'un torrent de fumée vomi des entrailles de la planète. Baigné par le rayon bleu il élève sa Durandal interstellaire, et , arrache son heaume ….C'est lui : Michael Jackson !
Quarante mille poitrines se vident dans un seul hurlement. Quatre vingt mille bras s'agitent comme des serpents. 22h dans l'immense Texas Stadium de Dallas, il fait 110 ° Farenheit, on est vendredi 13 et c'est la pleine lune : le concert magique du "Jackson'sVictory Tour" vient de démarrer. Plein la gueule ! Depuis plusieurs heures le Texas Stadium, qui ressemble à une soucoupe volante en béton posée dans la plaine, est assailli pacifiquement par des milliers d'humains, heureux possesseurs d'un billet pour le premier des trois concerts donnés par Michael Jackson à Dallas. Jusqu'à la dernière minute, l'inquiétude a régné : Michael viendra-t-il ? C'est la même angoisse tout au long de ce Tour le plus controversé, le plus imprévisible et le plus incroyable des spectacles de l'histoire du show business Américain. L'ampleur du phénomène est évidemment à la mesure de l'extraordinaire succès de Michael Jackson aux USA et dans le monde entier. "L'événement" titre les plus grands magazines américains depuis que cahin-caha le Jackson Circus, s'est mis en branle à travers l'Ouest comme un monstrueux chariot de western. Tout en haut, sur le siège du conducteur, celui qui tient les rênes, c'est Joe Jackson, le père. Cet ancien ouvrier métallurgiste de l'Indiana garde bien en main les affaires de ses six fils prodiges. C'est lui qui a proposé l'idée de cette aventure à Michael. Le but avoué : apporter un maximum d'argent à la famille. Ce "Black-Music-Business-Woodoo" comme l'appellent ses ennemis, a engagé un des promoteurs les plus controversés du Black-Busines show: Don King. Il l'a assis à côté de lui sur le siège du rocher, un fusil en travers des genoux. Un choix étonnant. Le roi des managers de la boxe professionnelle, jadis condamné à 4 ans de bagne pour avoir tué un homme qui lui devait 300 dollars, est maintenant à la tête d'une fortune colossale. Mais, Don King a avancé cash aux Jacksons trois millions de dollars pour leur tournée, garantissant comme bénéfice aux six frères près de trois millions et demi de dollars chacun. Un million huit à Joe et à sa femme et la même somme pour lui-même. Sous la bâche du chariot, un matériel jamais vu. La scène fait plus de 1 300m2, un système électrique de 12 000 volts (on utilise habituellement moins de la moitié). Plus d'une centaine de baffles montées sur deux tours hautes de 70 mètres, en tout 375 tonnes de matériel véhiculé dans 22 semi-remorques manœuvrées et protégées par 500 personnes. L'ensemble est tout peinturluré aux couleurs de Pepsi Cola, sponsor exclusif du Tour qui a payé ce privilège trois millions de dollars. Jamais le show business n'a autant mérité son nom, si on ajoute les pourcentages versés à la famille sur la vente des boissons, des hot-dogs, des tee-shirts, et …. Des tickets de parking (5 dollars). Sous le harnais, les frères Jackson et surtout Michael, la vedette incontestée et incontestable de cet attelage gigantesque. Le frêle Michael, le mutant, le petit prince aux pommettes hautes, extirpé de sa bulle protectrice en purs rêves irisés, projeté dans la poussière de la route, la chaleur des stades, sous une pluie verte de dollars ! Avec un léger parfum de scandale. C'est une petite fille de Dallas qui a mangé le morceau. Quelques jours avant l'arrivée du Victory Tour, elle a , comme des milliers de fans fait la queue pour acheter un billet. Après quelques heures d'attente, 30 dollars à la main, elle s'est vue refoulée sans appel. Motif : chaque personne est obligée d'acheter 4 billets à la fois (au minimum et au maximum d'ailleurs), soit débourser 120 dollars. Désespérée, Jones Ladona écrivit sans grand espoir à Michael. "Comment peut-on être aussi mesquin envers tant de pauvres gens". Cette lettre publiée dans le journal local fit grand bruit au point d'arriver aux oreilles de Michael. A sa manière douce, Michael fit preuve d'une autorité et d'une fermeté que personne ne soupçonnait. Il convoque une conférence de presse pour annoncer qu'il a décidé de changer le système de billetterie concocté par Don Kong et Papa Joe. Qu'un certain nombre de billets seront distribués dans chaque ville pour les hôpitaux et les indigents. Et enfin, que pour sa part il remettra la totalité de son cachet aux bonnes œuvres. A force d'imaginer un petit prince installé sur son petit nuage bleu, on avait fini par oublier que Michael a les pieds bien sur terre. Quant à Jones Ladona, une superbe limousine (aux couleurs de Pepsi Cola) est venue la chercher personnellement dans sa banlieue triste pour l'emmener au concert où elle a gagné un gros baiser de son idole. Le sordide n'a pas sa place dans les contes de fée. Reste tout de même le prix élevé de la place qui exclut une grande partie du public de teen-agers qui font le succès de Michael, principalement dans la communauté noire. Les frères Jackson estiment que c'est un prix bien élevé et Michael en est bien conscient que cela nuit à son image. Pourtant sur ce point, les organisateurs ont été inflexibles malgré un net ralentissement des locations dans les prochaines villes, Philadelphie, Boston, Los Angeles et New York. Un petit tour dans les travées bondées du Texas Stadium donne un aperçu de Michael Jackson : des milliers d'enfants blonds et roses accompagnés par leur grandes sœurs coiffées comme Sue Ellen ou, comble de l'élégance Texane, à la Fara Fawcett, native de l'endroit. Il y a aussi des pépés et des mémés avec des lunettes pointues. C'est l'Amérique de Walt Disney, clean et dodue qui s'impatiente tranquillement en mangeant du pop corn bien salé avant de boire un bon verre de Pepsi bien glacé et de se renfiler une grande poignée de pop corn, etc. Joan, 15 ans trépigne dans l'allée sur ses talons hauts en plastique vert pomme devant les cabines judicieusement placées aux points névralgiques : "Je suis tellement excitée que c'est la quatrième fois que je vais faire pipi en une heure" déclare-t-elle avec cette ingénuité qu'on aime tant chez Lucy Ewing. Il y a quelques Noirs dans le stade, pour la plupart déguisés en Michael Jackson, poursuivis par un reporter de Life Magazine qui veut tous les faire poser pour une photo. Brian a 15 ans et Sherry 18, ils sont venus avec leur petit frère Christian 3 ans. Brian m'explique qu'il se met de la glycérine sur les cheveux pour qu'ils fassent des frisottis et un produit chimique sur le visage pour qu'il s'éclaircisse et prenne cette couleur jaune clair très chic. Il a acheté pour 150 dollars une veste croisée en vinyl noir et un pantalon du même métal sur lequel sa mère a cousu une dizaine de fermeture Eclair. C'est sa sœur Sherry qui a cousu la centaine de paillettes argentées sur son gant blanc qu'il porte à la main droite et sur ses chaussettes blanches qui dépassent de des deux chaussures. Brian ne s'est pas fait refaire le nez ni les pommettes mais il s'est déjà renseigné pur les modalités de l'opération. Son rêve est de devenir le sosie complet de Michael. Pourquoi ? "Parce que c'est l'homme nouveau, l'homme du futur et bientôt tout le monde lui ressemblera. Même les blancs".

Le plus mignon, c'est le petit Christian, on dirait une poupée avec son minuscule gant blanc. Du côté des cheveux, c'est pas ça. Il est complètement rasé. Sa sœur Sherry m'explique qu'il a eu des malheurs avec des petites bêtes. Je me rabats précipitamment vers une grande fille qui berce une poupée noire de l'espèce qu'on adopte. Elle l'a revêtue d'un complet vinyl, de lunettes noires et lui a peigné des petits cheveux en laine bouclée. Je lui demande comment elle l'a baptisée. Eh bien oui ! Le stade commence à s'agiter, Michael se fait attendre. Renseignement pris : alerte à la bombe. Mais la police ne prend pas la menace au sérieux, pour pénétrer dans le stade, tout le monde passe au détecteur de métal et montre le contenu de son sac. On ne plaisante pas avec la sécurité de Michael Jackson. Lui non plus. Ses déplacements se font en voiture blindée et lorsqu'il pénètre dans l'hôtel, il traverse le lobby à toute vitesse selon un ballet bien réglé. Un grand balèze marche devant, Michael derrière lui, collé, une main sur son épaule. Les autres gardes l'encerclent complètement, encastrés les uns dans les autres, comme les frères Ripolin sur les affiches. La sécurité dans la salle est assurée par un service d'ordre permanent renforcé par deux cents jeunes gens tout noirs recrutés sur place. Enfin, les projecteurs s'éteignent, un immense soupir de satisfaction fait vibrer le Stadium d'une joie enfantine lorsque apparaissent dans le désert d'une planète froide, sous la lumière verte et rose tombée du ciel, quatre étranges créatures surnaturelles … Après ce prologue, la conquête du Graal va se poursuivre tout au long de l'heure et demie du spectacle. Michael joue sur du velours : au succès de ses chansons, il rajoute les ingrédients des films à succès. Selon le principe de la tranche napolitaine, du bon sur de l'excellent, sur du meilleur, sur du super, ça devient fantastique. Lorsque la machinerie se met en route (11 systèmes hydrauliques manœuvrés par ordinateur), la scène devient studio hollywoodien. Un immense écran où les Jackson s'agitent en vrai relayé par un véritable écran, au-dessus, où sont projetés en gros plans en direct filmés par plusieurs caméras. Et on reste là, émerveillé par ce gigantesque clip. Le superlatif devient par trop terre à terre, on s'envole vers le cosmique. Spielberg et encore Spielberg. Des milliers de projecteurs multicolores s'allument et la scène devient jeu vidéo. Michael, héros de la guerre des étoiles, entonne "Wanna be starting something". C'est là que l'on mesure sa véritable dimension ! Loin d'être perdu au milieu de cette machinerie, il a transcende, tour à tour démoniaque, tendre, rebelle, méchant, glamour. Il passe avec succès d'un personnage à l'autre tout en restant unique. Il peut être Buster Keaton, mais aussi un Elvis Presley dont le jeu de hanches ne permet plus aucune équivoque quant à son potentiel sexuel. Il devient l'instant d'après un crooner qui n'a rien à envier à Franck Sinatra. D'ailleurs, les groupies ne s'y trompent qui se mettent à bêler en même temps. Sa présence est telle que lorsque au milieu du spectacle il quitte la scène pendant que ses frères exécutent seuls trois morceaux, on a l'impression de tomber d'un rêve dans un concert classique, un peu mièvre. Son retour est un triomphe, comme si les machines elles-mêmes semblaient s'en réjouir. Des êtres monstrueux - comme de gigantesques princes à sucre avec un œil au milieu - le traquent : on pourrait en rire. On en frémit délicieusement. Dans ces histoires-là, le héros gagne toujours et c'est merveilleux. On le croit mort, allongé sur un catafalque, recouvert d'un drap blanc et puis dans un fracas de fin du monde, il réapparaît la minute suivante en haut d'une tour miraculée, ressuscité au milieu des explosions des fumées et des lasers. Et il chante "Thriller". Sa voix est aussi cloner que son apparence, métallique et haut perchée ou ronde et chaude, haletante et cruelle. Et, lorsque sur les dernières notes de "Beat it", il quitte nos vies avec un simple geste de la main, un immense feu d'artifice éclate au-dessus du stade, comme un cadeau d'adieu d'un ami très cher. Lui, est déjà loin, il nous laisse avec au cœur une pointe de chagrin comme …

eh bien ! comme quand E.T retourne à sa maison.

Fin.

Ndw : Note du webmaster

 

 
Recopié par Nabila (maman sarah) pour le site mjsuperstar.
 
Remerciement à Paris Match.

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